Nord Ouest de l'Iran

Rasht et le Gilan : voyage gustatif dans le Nord de l’Iran

Il suffit d’évoquer “shomal” (“le nord”) à un.e Iranien.ne pour mesurer dans ses yeux la singularité de cette région. Le Gilan, avec Rasht sa capitale, sont chéris de toutes et tous en Iran. Bordée par la mer Caspienne, et parsemée de forêts et de rizières, nous sommes loin des paysages désertiques que recherchent la plupart des touristes européens en Iran. Mais en prenant le temps de goûter à ses charmes, on se laisse vite porter par la douce mélancolie de ses paysages humides.

Pourquoi visiter le Gilan ?

Pour son atmosphère bien particulière que l’on retrouve dans nombre de films iraniens. Des bords de la mer Caspienne dans « A propos d’Elly », « Un homme intègre », « Les poissons tombent amoureux », à l’intérieur des terres dans la trilogie de Kiarostami : la liste est longue tant les lieux sont une source d’inspiration pour les cinéastes iraniens.

Le Gilan est une région privilégiée des touristes locaux qui souhaitent s’échapper de la capitale et trouver un climat plus vert. A l’inverse du Mazandaran, autre province du nord, le Gilan a su préserver son âme et éviter de n’être peuplé que de résidences secondaires.

Se rendre dans le Gilan, c’est découvrir à une autre facette de l’Iran. C’est enfiler ses chaussures de randonnée et son imper pour aller camper au-dessus des nuages. C’est goûter à l’une des meilleures cuisines d’Iran, classée patrimoine mondial immatériel par l’Unesco ! Et c’est découvrir un Iran qui fascine ses habitants.

Sur les étals du bazar de Rasht

Quand visiter le Gilan ?

Le Gilan étant bordé par la mer caspienne, il s’agit d’une région humide. L’été (juillet-août en particulier) est à éviter, car la chaleur rend le tout difficilement supportable. La meilleure saison commence à l’automne pour s’achever avec la fin du printemps. Prenez garde tout de même aux températures – très froides – si vous y allez en hiver et prévoyez des vêtements appropriés.

Comment se rendre dans le Gilan ?

Rasht est la capitale de la région et donc point de chute idéal pour visiter les alentours. Il existe de nombreuses liaisons de bus quotidiennes entre Rasht et Téhéran. Comptez environ 6 heures de bus pour parcourir les quelques 300 km qui séparent les deux villes.

Si vous avez le temps, faites un arrêt à Qazvin pour visiter la ville en chemin. Une nuit sur place peut suffire à découvrir la ville, une nuit supplémentaire pour ses environs.

Les plus pressés peuvent opter pour l’avion : là encore, des vols sont opérés quotidiennement entre Rasht et toutes les villes principales.

Le Bazaar à ciel ouvert de Rasht

Combien de temps passer dans le Gilan ?

Un long week-end paraît le strict minimum pour visiter Rasht sur une journée, et filer ensuite à Masuleh.

Si vous avez un petit plus de temps, rendez-vous au bord de la Caspienne, à Bandar-e Anzali, sur une journée, et/ou à Lahijan, au milieu des rizières sur une autre.

Pour celles et ceux qui peuvent prendre leur temps et aiment la nature, le Gilan a de quoi vous occuper de nombreuses autres journées.

Que faire et que voir à Rasht et dans le Gilan ?

Place Shahrdari

Le centre-ville de Rasht n’est pas très grand et se visite facilement en quelques heures. Les artères principales partent de la place Shahrdari, où se trouve la mairie de la ville, à l’architecture singulière et colorée. De nuit, la place est particulièrement animée.

Rasht se visite surtout en flânant. La ville a bien un musée, mais c’est pour son ambiance qu’on y vient. Ville libérale, elle est considérée comme la plus “européenne” d’Iran (je ne sais pas bien sur quels critères, cela dit).

Le Bazar de Rasht

Bien-sûr, le meilleur endroit pour prendre le pouls de la ville, c’est son bazar situé à quelques rues de Shahrdari. Celui de Rasht est unique car à ciel ouvert. On y vend surtout de la nourriture, des fruits et légumes frais, des poissons, des tonnes de torshi (voir plus bas), des herbes en tout genre. C’est une ambiance de marché comme on l’imagine : un peu bruyant, très coloré, et parfumé. Les souvenirs que l’on achète là sont de ceux qui se dégustent sur place !

Gilan Rural Heritage Museum

Le Gilan Rural Heritage Museum est un musée en plein air qui se situe à la sortie de la ville. Sur 150 hectares, on y retrouve plusieurs maisons construites grandeur natures selon l’architecture locale. L’objectif du musée est de montrer les traditions et artisanats de la région au travers de ce village et via les ateliers qui y sont organisés. Il s’agit du plus grand “eco-museum” du Moyen-Orient.

Masuleh

Masuleh

Masuleh est l’un des villages les plus touristiques du pays mais pour l’heure, cela n’enlève rien à son charme. Certes, ses allées sont remplies de magasins de souvenirs, mais il fait toujours bon les arpenter. Bâtit au pied de la montagne au Xe siècle, Masuleh a cela de particulier qu’il est construit sur plusieurs niveaux. Ici, les toits des un.e.s sont les ruelles et les cours des autres ! L’idéal est d’y passer une nuit pour apprécier au mieux la quiétude des lieux lorsque le village s’emplit de brume. Pendant la journée, enfilez vos chaussures de randonnée et préférez la montagne au village.

Pour rejoindre Masuleh depuis Rasht, vous trouverez des taxis partagés et des minibus. Il vous faut en général descendre à mi-chemin, à Fuman, pour prendre un autre taxi direction Masuleh. Le trajet prends environ 2 heures de cette façon.

Le Château de Rudkhan

Rudkhan est une forteresse médiévale datant des Sassanides (224-651). Bien que perchée sur deux monts, elle semble comme perdue dans la forêt. Il faut affronter 1024 marches pour en atteindre l’entrée, soit une balade sportive de quelques heures (2 ou 3 selon votre allure). Mais ne vous découragez pas, le jeu en vaut la chandelle : il reste de beaux vestiges de la forteresse, qui a été particulièrement bien préservée.

Rudkhan se situe à environ une heure de Rasht, à proximité de la ville de Fuman (pourquoi citer cette ville ? Pour ses gâteaux aux noix et à la cannelle !) et en direction de Masuleh (1h). La visite peut donc se faire à l’occasion du trajet entre ces deux destinations.

Bandar-e Anzali

L’intérêt principal de Bandar-e Anzali, ville portuaire et zone franche, c’est son lagon. Un paradis pour les oiseaux migrateurs qui s’y rendent en hiver, quand en été, il se voit recouvert de fleurs de lotus. Il est possible de faire une balade sur une embarcation pour en apprécier toute la beauté, lors d’une virée d’une après-midi depuis Rasht.

Lahijan

Lahijan peut aussi constituer une visite à la journée depuis Rasht. La ville est surtout connue pour son thé et est entourée de rizières. C’est là qu’a débuté la culture du thé en Iran et la ville méritait donc son musée dédié ! Les principales attractions de la ville sont son parc, son lac et sa cascade. Il est aussi possible de faire un tour en télécabine afin d’avoir une vue sur toute la ville.

Olesbelangah et Masal

Toujours sur ma to-do list, Masal et Olesbelangah (rassurez-vous, mêmes les Iranien.ne.s ont du mal à le prononcer) sont deux villages perdus dans la montagne. En soit, ces villages n’ont pas l’attrait de Masuleh, mais ce qui fait leur singularité, c’est leur vue : situés en altitudes, ils offrent un panorama à couper le souffle, avec, souvent un océan de nuage ! L’endroit idéal pour planter sa tente ! Mais tâchez de le faire en été ou au printemps car les températures descendent très vite.

Quid de la mer Caspienne ?

Sur les bords de la mer caspienne

En toute sincérité, les bords de la Caspienne ne sont pas particulièrement idylliques. J’aime pourtant la mer à un point que je me damnerais pour passer mes vieux jours sur un coin de plage à Qeshm. Mais la Caspienne a un côté monotone et banal qui rendent ses plages sans grand intérêt à mes yeux. La virée en bord de mer n’est donc pas indispensable.

Où loger à Rasht et dans le Gilan ?

Le choix en matière d’hôtels à Rasht est assez réduit. Le Kadus Hotel est le meilleur de la ville : un cinq étoiles qui ne les fait pas forcément, mais est tout de même correct. Le Pamchal Hotel est un hôtel meilleur marché qui peut suffire.

Si vous avez l’intention de vous rendre à Masal ou dans l’arrière-pays, les options les plus évidentes sont soit d’apporter votre tente, soit de louer une « villa » (maison individuelle) pour la nuit. Cette dernière option se fait généralement en ligne, sur des sites en persan et en réservant avec une carte bancaire iranienne. De l’aide est donc requise.

Pour les auberges de charmes, il faut sortir de la ville pour les trouver. Deux d’entre elles sont particulièrement connues (je n’ai pas encore eu l’occasion d’y aller moi-même) : Lotka Ecolodge avec ses maisons en bois et sur pilotis, l’architecture typique de la région. Elle se trouve tout près de la mer, à 30km au nord de Rasht. Et Gileboom Ecolodge, pour ceux qui arrivent depuis la route de Chalous (situé 22km après Ramsar, sur la côte).

A Masuleh, il est assez facile de trouver des logements touristiques à louer sur place. Mais renseignez-vous en amont, depuis Rasht, si vous visitez le village en haute saison.

Où boire et manger à Rasht ?

Les meilleurs gâteaux d’Iran se trouvent à Fuman

Absolument partout ! Le Gilan se targue d’avoir plus de 170 spécialités locales, et sa cuisine a été classée patrimoine immatériel par l’Unesco.

La cuisine du Gilan est très parfumée et tourne autour de l’utilisation d’herbes locales, de grenade, de noix, et bien-sûr de poisson. C’est au Gilan que l’on doit le meilleur plat iranien (en toute non-objectivité) : le khoresht fesenjoon خورش فسنجون , un ragoût de viande (poulet, canard ou veau) longuement cuit dans de la mélasse de grenade et des noix.

A ne pas manquer également :

  • L’incontournable Mirza Ghasemi میرزا قاسمی (une mixture d’aubergines, d’œufs et de curcuma)
  • Kebab Torsh کباب ترش (du poulet en kebab, c’est-à-dire grillé, et mariné dans de la mélasse de grenade)
  • Morgh-e Torsh مرغ ترش (un ragoût de poulet aux herbes et à la grenade)
  • Baghali Ghatogh باقالی قاتق (un ragoût de fèves avec de l’aneth et des œufs)
  • Torsh-e Tareh ترش تره (ragoût de poulet avec un mix d’herbes local)
  • et la liste est encore longue…

N’hésitez pas à goûter les différentes âsh آش (soupe épaisse) locales, et ne manquez pas d’accompagner vos repas de zeitoon parvadeh زیتون پرورده (des olives vertes avec une mixture de… ? Grenade et noix, bien sûr !) et de l’ail confit ترشی سیر.

Pour les adresses, le meilleur restaurant de Rasht est sans doute Shekam Ol Molouk. On y sert parmi les meilleurs plats que j’ai pu goûter en Iran (rien que de penser à leur fesenjoon rashti, je suis prête à prendre un billet pour Rasht). Shore Coli est également un restaurant très connu qui propose une excellente cuisine dans un très joli cadre.

(Si vous n’avez pas l’occasion de vous rendre à Rahst, je vous recommande de goûter à la cuisine du Gilan, à Téhéran, dans l’excellent Restaurant Behzad)

Mais tant que vous êtes dans le Gilan : en vous rendant au bazaar de Rasht, ou sur le chemin pour Masuleh, faites-moi le plaisir de goûter les gâteaux de Fuman (“Kolouche Fumani”). Des gâteaux à la noix et à la cannelle, très simples mais incroyablement délicieux (à Téhéran, vous pouvez en acheter à côté de Meydan-e Enghelab, à Kolouche Sonati Fumani)

That’s the spirit.

Remarque : Si vous avez déjà voyagé en Iran, vous aurez peut-être noté que les torshi se font une place un peu partout dans la cuisine iranienne. Torsh veut dire « aigre ». Certains de ces goûts aigres, qu’ils soient dans des plats salés ou sucrés, peuvent surprendre au début, mais on y prend vite goût. La cuisine du Gilan excelle dans l’utilisation de ces saveurs. Quant à ceux qui voudraient reproduire ces plats (ou simplement se faire saliver d’avance), j’en profite pour recommander le site The Caspian Chef.


Vous l’aurez en tout cas compris, un voyage dans le Gilan est une expérience culinaire à part entière !

En dehors du voyage gustatif, il est assez difficile de résumer les principales attractions du Gilan. Il s’agit une région qui ne possède pas vraiment d’ncontournables et qui n’est pas aussi dépaysantes pour nous, voyageur.euse européen.ne, que d’autres partie de l’Iran.

En revanche, elle possède une atmosphère à part, des traditions et une identité très forte, qui la rende unique et méritent d’être connues.

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